10 juin 2016

Lobbying pour NDDL (29) : Leyritournelle

Qui pouvait sérieusement croire que le rapport de la Commission nationale du débat public (CNDP) présenterait un véritable intérêt ? Il fait ce qu’on en attendait : résumer les arguments en faveur du projet de construction d’un aéroport à Notre-Dame-des-Landes en respectant un semblant d’objectivité.

Ainsi, il cite bien sûr le rapport des trois experts du Conseil général du développement et de l’environnement durable (CGEDD) révélé en mars dernier… mais presque uniquement à travers ses mentions susceptibles de servir les raisonnements favorables au projet de NDDL. Par exemple, à propos de l’aéroport actuel de Nantes Atlantique, la CNDP cite ainsi le CGEDD : « l’installation apparaît étriquée et inconfortable ». Le CGEDD écrivait en réalité : « Visuellement, l’installation apparaît étriquée et inconfortable. Une extension de ces installations devient urgente, ne serait-ce que pour garantir un traitement du passager de qualité. »

De même, si les arguments des adversaires du projet sont cités, ils le sont en général au conditionnel ou avec un soupçon de condescendance. Ceux des partisans sont souvent reproduits à l’indicatif présent, et quelquefois mis en valeur par des caractères gras (« Les responsables des collectivités et la Chambre de commerce et d’industrie (CCI) de Nantes Saint-Nazaire estiment »…)

Le vocabulaire de la CNDP est celui des partisans du projet. J’ai dit ici comment le mot « piste », à propos d’un aérodrome privé maintenu à Nantes Atlantique, était un marqueur propagandiste. On le retrouve dans le document de la CNDP :

« En l’état actuel, la piste de Nantes Atlantique serait maintenue pour un usage strictement industriel d’Airbus avec deux ou trois vols par semaine en fonction des besoins logistiques du pôle industriel aéronautique. »

Mais attendez ! « Serait maintenue », ça reste un conditionnel. Si c’est « en l’état actuel », c’est que l’état futur pourrait être différent, c’est qu’une décision capitale pour l’évaluation du projet n’est pas encore prise. On nous demande donc de voter pour un projet inachevé ? Ou de nous prononcer au vu d’un dossier bâclé ?

Il est vrai que la CNDP n’a disposé que d’un délai manifestement beaucoup trop court pour faire le tour de la question. Et peut-être son président, Christian Leyrit, longtemps proche des groupes du BTP et du paysagiste choisi par Vinci Airport, n’avait-il pas très envie, au fond de lui-même, de faire de la peine aux porteurs du projet. Mais quand même, il n’est pas nécessaire de gratter beaucoup pour apercevoir, derrière un site web qui se veut pro, des insuffisances béantes.

Dont celle-ci, qui pourrait s’avérer un vice rédhibitoire : pas une seule fois le rapport n’évoque la loi du 3 août 2009, qui n’autorise les transferts d’aéroport que « pour des raisons environnementales ». Ce qui condamne d’un coup à la poubelle tous les arguments sociaux et économiques invoqués par la CNDP en faveur du projet.
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Addition du 15 juin : les notes ci-dessus sont issues d'une lecture rapide du rapport de la CNDP. Après étude approfondie, l'Atelier Citoyen a publié une critique beaucoup plus approfondie (et franchement alarmante quant à la neutralité alléguée par la CNDP).

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